1.-Le sommet de Washington (Novembre 2008)
Il consacre un nouvel ordre économique avec l'incorporation au club de pays dits "émergents" (Brésil, Russie, Inde, Chine,...) ou BRIC. Cette incorporation est due en partie à la demande réitérée de ces pays à participer au club et bien sûr à la nécessité d'en finir avec le spectacle d'un noyau hégémonique de plus en plus cerné par les projecteurs. Mais la création du G20 est surtout une réponse à la préoccupation du club par l'extension de la crise à ces pays qui se développaient à un bon rythme: il convient en effet, face à l'ampleur de la crise, de renouveler un prêt qui atteint 1billion de dollars, condition pour que le moteur économique ne se grippe dangereusement.
L'incorporation de ces pays dans la règle du jeu permet ainsi au pouvoir dominant d'intégrer à ses propres dynamiques la construction d'un espace public mondial afin de réaliser sa prétention de pouvoir global. Pour Lula (Le Monde 8 Juillet 2009): «Le défi consiste à éviter que le G20 n'ait été qu'une opération chirurgicale sans lendemain. Ma crainte est que certains pays riches ne veuillent du G20 que pour surmonter cette crise, Le G20 doit fonctionner de manière permanente… En attendant que nous parvenions à adopter une réforme des Nations Unies qui permette à une ONU plus représentative de coordonner les discussions économiques avec pa participation des petits pays… La démocratie a besoin de forums multilatéraux renforcés»[1]. La Chine reste la locomotive pour les pays pauvre du Sud-Est Asiatique, l'Afrique et l'Amérique du Sud[2].
2.-Le G 20 met en marche le nouveau système financier.
Un plan de relance de l'économie et de l'emploi par la stimulation fiscale en particulier dans les pays riches a été lancé en 2008 et ne sera renouvelé que dans une phase ultérieure (New York, Septembre 2009).
Mise en place d'un système de régulation de la finance mondiale. Des instruments de contrôle permettant d'éviter ultérieurement la répétition de ce type de crise sont prévus dans le but immédiat de «restaurer la confiance dans le système bancaire» et le réamorçage du crédit.
Ces instruments de contrôle sont en particulier l'augmentation des compétences du "Conseil de stabilité financière" pour coordonner les nouvelles normes de régulation du secteur financier, la demande aux places financières qui sont dans la liste des "paradis fiscaux" d'accepter l'échange d'informations sous peine de sanctions, l'obligation aux fonds de haut risque de se faire enregistrer auprès de la supervision de chaque pays qui décidera du mode de contrôle des fonds spéculatifs en fonction de leur taille.
La réforme de l'économie aux USA qui provoque l'euphorie des Bourses correspond aux normes de comptabilité des banques: leurs actifs financiers ne seront plus valorisés mensuellement au prix du marché (mark-to-market) mais il sera introduit d'autres facteurs dans la valorisation des actifs qui donnerons plus de liberté pour fixer le prix des actifs non liquides qui ont une valeur à courte échéance selon les banques concernées. Cette décision inquiète certains experts qui pensent qu'elle quitte toute transparence à la situation véritable des entités financières, en particulier pour ce qui est des actifs toxiques qui se retrouvent masqués par cette réforme, ce qui va à l'opposé du but recherché. Ces analystes, à travers le Centre pour l'intégrité des Marchés Financiers, déclarent que «les standards de valorisation juste, critiques pour l`'intégrité des marchés, doivent être maintenus».
Pour Jacques Attali, la régulation entraîne les remarques suivantes: quel bénéfice une meilleure transparence de l’information financière, obtenue à l’aide d’une surveillance accrue, apportera-t-elle dans le contexte présent de la distribution, non pas des revenus, qui peut être infléchie par la fiscalité, mais du patrimoine ? Un nouveau départ ne réclame-t-il pas nécessairement de remettre les pendules à l’heure pour ce qui touche aux colossales rentes de position actuelles de ceux qui se sont appropriés au fil des siècles les communs : l’accès aux ressources naturelles, à la terre, à l’eau, aux ressources minières, ou la licence pour eux de polluer et de détruire la planète impunément ? Le caractère sacro-saint de la propriété privée ne doit-il pas être révisé dans les cas où cet a priori menace la survie même de la planète?
Reste à savoir si l'on en finira avec l'impunité des banques qui sont trop importantes pour tomber et qui demandent une aide des Etats quand le risque de faire capoter le système financier se présente. Il s'agirait de faire agir les organismes de surveillance au cas où une banque de dispose pas de capitaux proportionnels aux risques qu'elle prend par exemple.
Alors qu'ils n'ont pas encore été réformés, la BD et surtout le FMI voient leur rôle augmenter par la mise en place d'une "ligne de crédit flexible" auprès des pays débiteurs et la gestion de sommes jamais atteintes à ce jour pour leur fonction. Acte de prestidigitation dans la mesure où il ne s'agit pas d'argent neuf à dépenser sinon de ce que le FMI estime être le déficit conjoint du G20 entre 2007 et 2010.
Cependant, les circonstances obligent, comme dit Lula (Le Monde 8 Juillet 2009): «Avant, le FMI et la Banque mondiale avaient des solutions toutes faites, péremptoirement assénées tant que la crise touchait les pays pauvres. Mais, cette fois, à Londres (sommet du G20 en 2009) il n'y avait plus de proposition dès lors que la crise touchait aussi les riches. Il n'y avait plus de certitudes, de recettes toutes faites. Cela a rendu tout le monde beaucoup plus humble… Le FMI et la BM auront un rôle accru, pourront prêter aux pays pauvres, sans bâillonner leurs économies comme auparavant, tout en respectant leur souveraineté»…
Et Jacques Attali d'ajouter: «Ne voyons-nous pas en ce moment les autorités financières y perdre leur latin ? Et quand vous évoquez un rôle accru pour le FMI ou la Banque Mondiale, qui nous garantira que leurs politiques seront mieux avisées dans l’avenir qu’elles ne le furent dans le passé, quand leur aveuglement idéologique les conduisit bien souvent à accroître la misère des populations des pays qu’ils guidèrent dans la gestion de leur dette ?... les économistes se sont montrés incapables d’apercevoir la crise qui se profilait à l’horizon n’augure rien de bon»
Le but de cette opération de renforcement du FMI est d'aborder avec efficacité les causes sous-jacentes des nécessités financières de la balance des paiements des pays, et en particulier le retrait des flux de capital externe à la banque et aux secteurs corporatifs. «Nous sommes décidés à réformer et moderniser les institutions financières internationales pour garantir qu'elles peuvent aider de façon efficace ses membres et ses actionnaires face aux nouveaux défis…augmenter la crédibilité et la responsabilité des institutions à travers une meilleure supervision stratégique et une meilleure prise de décisions» (texte du sommet).
L'élimination des obstacles à la concurrence est confirmée: «nous abstenir de lever de nouvelles barrières à l'inversion ou au commerce de biens et services, d'imposer de nouvelles restrictions …nous prendrons en même temps toutes les mesures qui sont en nôtre pouvoir pour stimuler et faciliter le commerce et l'inversion» (texte du sommet). Et en ce qui concerne la ronde de Doha «nous continuerons à nous compromettre pour atteindre une conclusion ambitieuse et équilibrée…et continuer dans la ligne de progrès déjà réalisé» et cela sans fixer de dates compte tenu de l'échec de cette ronde due aux positions confrontées des riches (surtout US) et des émergeants(surtout Inde) sur les subventions aux agriculteurs.
A la liste des bonnes intentions s'ajoute la publicité percutante et les évidences:
«Nous ne répèterons pas les erreurs historiques du passé sur le protectionnisme» (G20)
«L'époque du secret bancaire est terminée» (G20)
«C'est la réforme la plus profonde du système financier depuis 1945» (Sarkozy)
«C'est la fin du consensus de Washington» (Brown)
«C'est la fin de la bulle économique» (Obama)
…Pour Lula (Le Monde 8 Juillet 2009): «Nombreux sont ceux qui…ne souhaitent pas conclure les négociations du cycle de Doha sur une nouvelle phase de libération des échanges. Mais commet croire à un monde plus juste sans autoriser l'accès des produits agricoles des pays pauvres sur les marchés des pays riches? Sur quelle base un pays comme les EEUU décident-ils de produire de l'éthanol de maïs (aliment de base pour le bétail et les hommes) coûtant trois fois plus cher que l'éthanol de canne à sucre».
Le Monde du 16 Septembre 2009: Les barrières douanières retardes la reprise après une crise car l'économie a besoin que le libre-échange soit défendu afin de neutraliser le protectionnisme et ses conséquences néfastes. Dans les années 30, les barrières douanières dressées aux EEUU avaient provoqué un recul de 65% des échanges internationaux et avaient effacé la plus grande partie des bénéfices tirés de la mondialisation, ce qui a aggravé la Grande Dépression et retardé la fin de la convalescence d'une dizaine d'années.
Le leadership de la présidence américaine est confirmée:
«Nous venons avec l'intention d'écouter et apprendre, mais aussi avec le propos de promouvoir le leadership nord-américain, et je crois que le document produit reflète avec un large spectre nos priorités» (Obama).
«C'est à l'Amérique qu'il revient d'œuvrer au redressement global et reconstruire la confiance dans le monde»… «Il revient aux Etats-Unis d'assumer toujours le leadership…[aux partenaires] de se joindre à eux» (Obama "Le Monde" 25/03709).
«L'ère Obama commence comme une époque où le capitalisme a freiné son chemin incontrôlé à l'abîme (sic) et acquiert un profil plus prudent, plus égalitaire et plus durable» (El País).
«Nous souhaitons un dialogue avec le reste du monde sur les grands sujets auxquels nous devons faire face collectivement. Il s'agit d'une approche qui souligne le respect que nous avons pour tous nos alliés et les pays qui, par leur conduite, s'en montrent dignes» (James Jones "Le Monde" 25/03709).
Notes
[1] Les BRIC, et particulièrement la Chine, ont tiré vers le haut la croissance mondiale ces cinq dernières années, mais on ne peut espérer que cela continue. Même lorsque la demande extérieure sera stabilisée, ce qui est décisif pour la croissance chinoise, des tensions sociales dont la transcendance est insoupçonnable peuvent avoir lieu ce qui compromettra les avancées enregistrées ces dernières années (El País du 12 Avril 2009). Il convient de prendre en compte que la Chine dispose de 2000 milliards de dollars en réserve de devises. Sa proposition de créer un panier commun avec une nouvelle devises qui se substitue au dollar rappelle la proposition de Keynes a Bretton Woods. Mais cela n'avance à rien actuellement, car le dollar continue à être une bonne monnaie de repli pour tous à court et moyen terme. La Chine, tout comme les Indes se doivent d'augmenter la demande interne et le crédit à la consommation pour rester dans la règle du jeu.
2] La consommation privée en Chine n'est que la sixième partie de celle des Etats Unis. En 2008, si le PIB était de17 pour la UE, 14 pour les EEUU, 4,5 pour le Japon il était de 3,5 pour la Chine.