Europe-Entretien avec Peter Sloterdijk


¿Pourquoi est-il si dubitatif sur le terme même de « Europe »?
Je me révolte de plus en plus contre l’usage irréfléchi de ce mot. Personne ne se rend plus compte de l’émergence du mot Europe. Note population se trouve dans une situation inattendue et déstabilisante après la découverte du Nouveau Monde : nous sommes devenus Vieux Monde même si le nouveau est peuplé de ceux du vieux. Jusqu’à ce moment là, le vrai nom de cette région du monde était « Occident » face à « Orient », jeu de langage classique et idéologique cui crée des différences avec le « midi » qui est le proche orient méditerranéen. La France classique, la Gaule, et les iles Britanniques sont l’Occident, la fin du monde. La dimension atlantique et l’existence du nouveau monde transforment l’occident en Europe.  Devenir Europe est un drame relativement jeune (500 ans). Ce n’est pas en tant que européens que les anglais, français, espagnols, portugais, polonais… ont essayé de créer des empires.
Il conviendrait de laisser le concept d’Occident (Hamland en allemand : le pays du soir qui fait partie du vocabulaire de la révolution conservatrice allemande du début du XX s. et du nazisme donc suspecte). Les mots transportent une vibration sémantique et le refoulement des réalités géopolitiques dans ce cas. Surtout en Allemagne où l’on a toujours misé sur une vision du monde extrêmement territorialisée. Le refoulement de la réalité géopolitique et surtout planétaire dans l’attachement territorial (pour les russes, face à l’immensité du territoire, on dit que Dieu a remplacé le temsp par l’espace, notion d’infinité). Il y a donc un refus de la situation atlantique et bien sûr du Pacifique !

L’Européen aujourd’hui :
L’allemand, par exemple, essaie de comprendre que l’endroit qu’il habite est un endroit qui promet à ses habitants quelque chose que les économistes appellent « une rente du lieu », c.a.d quelque chose qui est donné au moment où on nait quelque part : où que tu sois, tu es nourris, on t’entoure par plusieurs couches de bienfaits jusqu’à tes 5 ans puis il y a un investissement jusqu’à 30 ans pour un seul individu pour qu’il devienne un membre actif de la réalité dans la société européenne, où qu’il soit : beaucoup de jeunes sont éduqués dans ce système de pensée.

La relation entre l’expérience européenne et l’Etat providence.
Le système de soutien a atteint des sommets historiques. Être européen aujourd’hui c’est participer d’un système de « garderie » diraient les anciens. Il crée un oubli général des conditions de possibilité de cette forme de vie. Tout ce qui est presque impossible a la forme du « donné » à partir de laquelle on peut formuler des revendications qui vont toujours plus loin, ce qui n’existe nulle part ailleurs. Mais il y a une innovation historique dans un projet de convivialité de 500 millions de personnes formant un empire sans empereur. C’est un miracle historique qu’il faut remplir d’un élan subjectif. Le politique se doit d’animer et réanimer la reaíté européenne qui est déà suffisamment impressionnante. Sinon, elle peut tomber en panne et se dissoudre.
 Il n’y a pas de grandeur sans l’attente de la chute, c’est le discours de la modernité et du romantisme. –Cela fait partie maintenant de la mentalité moderne. On peut être inquiet mais la relation entre les 27 petits chefs d’état trop sérieux est trop forte, trop réelle pour être mise en cause.  Même les populistes de l’extrême droite sont tous pris dans cette « éducation sentimentale et politique » que tous sont en train d’apprendre ; ce n’est pas innés, apprendre à vivre dans cette structure qui a 70 ans, enfant de la défaite de l’Allemagne, de la ruine de la France, une Italie surchargée et une Europe de l’Est dévorée par l’agression soviétique : cela est le point de départ
¿Est-ce une ironie qu’elle soit dominée par l’Allemagne maintenant ?
Une ironie remarquable, c’est le genre d’ironie que l’histoire semble préférer. Le peuple juif, par exemple, incarne cet élément ironique et tragique encore plus prononcé aujourd’hui après la somme de débacles que ce peuple a connu : il est plus nombreux et a une sorte de résilience, cette faculté de se redresser et s’il faut parler de l’avenir de l’Europe il faut parler de ce redressement qui a eu lieu, ce miracle après 1945.

¿Pourquoi aujourd’hui « la politique est-elle en déliquescence » ?
La question exige une audace de simplification et la plus hardie des simplifications serait de prétendre que la politique est une invention du temps de réflexion qui date des grecs de 2500 ans avec les orateurs sur la place publique en Grèce (le pupitre de l’Agora). On crée des iles de réflexion, on arrête le temps, on introduit une pause, berceau de la réalité politique, riche des inspiratins de la pause.  C’est une interruption de l’activité pour enrichir l’action par la réflexion après la pause. On peut alors concevoir ce que sera une législation illuminée. Cela a été oublié par un millénaire et doit être réinventé depuis la renaissance.
Le destin de l’Allemagne avec Nietzsche, Heidegger, Freud…
C’est devenu un pays d’importation d’idées après la guerre. Ouverture à la précision technique, l’américanisme et l’abandon de la prétention allemande qui est d’écrire le scénario, le manuel de l’éthique de l’humanité toute entie`re, et surtout Marx : l’Allemagne a toujours été le centre d’exportation des erreurs majeures. Par exemple, la Chine dépend entièrement des importations des erreurs allemandes : les Mercedes, BMW, peuplent les rues de la Chine mais c’est toujours camarade Marx duquel le parti prétend contrôler la vie d’un peuple. C’est le résultat de l’exportation des idées allemandes.
Actuellement l’Allemagne fait une cure de normalisation en espérant encontrer dans la France les éléments de cette normalisation. C.a.d un pays qui laisse tomber son fantasme d’élection. Il fallait arracher au judaïsme le privilège de l’élection pour toutes les églises chrétiennes et se l’approprier : cela s¡est produit sur tout le sol européen mais encore plus aux USA qui représente un fourmillement de groupes d’élus. Les allemands sont les premiers-nés des non-élus et c’est pour ça qu’on se méfie de cette mégalomanie qu’un chef peut exprimer, son statut d’élu, une mégalomanie qui est en fait une réalité moyenne.  Face á cette mégalomanie, la France porte un héritage d’enthousiasme gratuit d’une population très inflammable, d’un révolutionnarisme bon marché : une histoire révolutionnaire qui a ses rechutes-un jeu révolutionnaire interrompu par des néo-monarchies. L’incapacité de se réformer est une caractéristique française.

Conservateur de gauche
Il ne faut pas abandonner les conquêtes sociales, c’est cela être conservateur, préserver un stock de prestations et de situations acquises a travers de luttes et la productivité de la techonologie moderne. Noter époque a une tendance dangereuse à la paresse. La dimension de ‘éducation est en déclin, la culture de l’effort disparait.
L’identité
Nous vivons à l’époque des fantômes et le spectre du nazisme a une étrange capacité de revenir et les fantômes ont besoin de sang réel pour se manifester et il faut tout faire pour le leur soustraire cette possibilité. ¿un retour du même comme disait Nietzsche ? Le plus grand risque consisterait dans une évolution perverse que l’impulsion régicide porte au pouvoir le lepénisme. C’est le non-voulu des gilets-jaunes qui explose et empoisonner une nation entière. 
Les médias changent tout par rapport aux années 30. La grande coalition des antilibéraux dans la première moitié du XXs., avec la grande coalition indirecte et non voulue, très perverse des antilibéraux : fascisme, communisme et catholicisme politique, triangle infernal qui a coopéré pour détruire ce qui pouvait sauver la civilisation face à la menace des années 30. On s’en rapproche de nouveau par le soi-disant capitalisme car le véritable capital est une monnaie investie dans une  entreprise concrète et le soi-disant capitalisme est spéculatif  et hyper gonflé qui n’a rien à voir avec la définition originale d’une monnaie entrant et investie dans une entreprise concrète.
Le manque de popularité du projet européen et le manque d’enthousiasme est la force du projet même. La grisaille des affaires européenne est un grand élément de vérité car il n’est pas compatible avec une mobilisation des masses qui correspond da une violence ou une guerre. Les européens sont très loin d’une mobilisation militaire ou idéologique est c’est un très bon signe. 


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